Il semble que la course au télescope géant entre l'Europe et les Etats-Unis soit en train de tourner en faveur du vieux continent. Ainsi, l'Extremely Large Telescope (ELT), en cours de construction au Chili au sommet du Cerro Armazones (a 3046 mètres d'altitude) deviendra le plus grand télescope optique sur Terre en 2028 (prévision) avec son miroir primaire de 39 mètres!
Mais historiquement c'est bien une première car l'Europe a jusque la toujours eu de retard en matière de télescopes géants.
Un peu d'Histoire
A commencer par le télescope de 2,5 m du mont Wilson achevé en 1917 dans le comté de Los Angeles, puis du 3 m du mont Palomar inauguré en 1949 près de San Diego. Pendant des décennies, les Américains ont toujours eu une longueur d’avance sur les Européens en matière de télescopes optiques.Et même une sacrée longueur d’avance... En 1976, l’Europe inaugurait le télescope de seulement 3,6 m à l’observatoire de La Silla, au Chili, alors que cela faisait déjà trente ans que les États-Unis scrutaient le ciel avec un engin de 5 m (au mont Palomar).
En 1976 également, l'URSS lance le télescope de 6 m de Zelentchouk, mais il souffre de problèmes techniques chroniques.
En 2007, le Gran Telescopio Canarias de 10,4 m devient le plus grand télescope optique, mais il reste moins performant que les instruments américains.
En 2007, le Gran Telescopio Canarias de 10,4 m devient le plus grand télescope optique, mais il reste moins performant que les instruments américains.
En menant ainsi la course en tête pendant près d’un siècle, les astronomes américains ont accumulé des découvertes fracassantes :
- depuis le mont Wilson, rien de moins que l’expansion de l’Univers et le Big Bang
- depuis le Palomar, la comète Shoemaker-Levy, les planètes naines Éris et Sedna, ou des flopées d’astéroïdes et de supernovas
L'Extremely Large Telescope change la donne
Mais aujourd’hui, la donne change. Les États-Unis sont en train de perdre la nouvelle manche de la compétition: celle des télescopes géants (24 à 39 m de diamètre). L’Europe, avec l’ELT (Extremely Large Telescope) de 39 m en construction au Chili, prend clairement l’avantage.Les projets américains rivaux, le Giant Magellan Telescope (GMT) de 24,5 m et le Thirty Meter Telescope (TMT) qui, comme son nom l'indique, devrait faire 30 m, souffrent de financements incertains, la NSF (National Science Foundation) n’ayant budgété que 1,6 milliard de dollars au lieu des 2,6 escomptés.
Côté Europe, le champion dans la catégorie "géants" se nomme ELT (Extremely Large Telescope) et son miroir mesure 39 m de diamètre. Déjà en construction au sommet du Cerro Armazones au Chili, il doit entrer en service en 2028. Foi de son maître d’œuvre, l’ESO (Observatoire européen austral), il sera une fois achevé "le plus gros œil ouvert sur le ciel".
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Le GMT est le plus avancé des 2 projets américains - mais il reste un ''mini-géant'' avec ses 24.5m de diamètre face aux 39m de l'ELT ! |
L’écurie américaine, quant à elle, concourt avec deux projets rivaux:
- le Giant Magellan Telescope (GMT) : 24,5 m de diamètre, coût estimé à 2,5 milliards de dollars (850 millions déjà levés).
- le Thirty Meter Telescope (TMT) : 30 m de diamètre, coût estimé à 3 milliards de dollars (2 milliards déjà levés).
Problème... le financement ne suit pas.
Problème... le financement ne suit pas.
En février 2024, la National Science Foundation (NSF) a annoncé ne disposer que de 1,6 milliard de dollars (sur les 2,6 escomptés) pour soutenir ces projets, obligeant les États-Unis à choisir entre le GMT et le TMT. Une décision critique attendue pour mai 2024, qui place les astronomes américains dans une position délicate face à l’avance européenne.
Le GMT avance bien. Ryan Kallabis, directeur de la communication du GMT, confirme que 40 % des éléments sont en construction à l’observatoire de Las Campanas, au Chili: les fondations sont prêtes pour le coulage du béton, les 7 miroirs primaires ont été façonnés à l’université d’Arizona, la monture du télescope est en cours de réalisation dans l’Illinois et un instrument dédié à la recherche d’exoplanètes (Large Earth Finder) est en conception.
Malgré l’incertitude financière, le consortium international du GMT assure son engagement à terminer le projet.
Avec son miroir de 30 m constitué de 492 éléments hexagonaux et doté d’un système d’optique adaptative (corrigeant les perturbations atmosphériques), le TMT (Thirty Meter Telescope) est un adversaire plus à la hauteur du géant européen ELT, mais il se heurte a des conflits de nature culturelle a Hawaï.
Le GMT avance bien. Ryan Kallabis, directeur de la communication du GMT, confirme que 40 % des éléments sont en construction à l’observatoire de Las Campanas, au Chili: les fondations sont prêtes pour le coulage du béton, les 7 miroirs primaires ont été façonnés à l’université d’Arizona, la monture du télescope est en cours de réalisation dans l’Illinois et un instrument dédié à la recherche d’exoplanètes (Large Earth Finder) est en conception.
Malgré l’incertitude financière, le consortium international du GMT assure son engagement à terminer le projet.
et a la fin c'est l'ELT qui l’emportera
Le problème, c’est qu’à peine commencé, le GMT (Giant Magellan Telescope) est déjà dépassé. Il est composé de sept miroirs de chacun 8,4 m d’ouverture, ce qui offre une surface collectrice de 24,5 m de diamètre. Sa résolution sera donc presque deux fois moindre que celle de l’ELT, quoi qu'il arrive!Avec son miroir de 30 m constitué de 492 éléments hexagonaux et doté d’un système d’optique adaptative (corrigeant les perturbations atmosphériques), le TMT (Thirty Meter Telescope) est un adversaire plus à la hauteur du géant européen ELT, mais il se heurte a des conflits de nature culturelle a Hawaï.
En effet, depuis que le Mauna Kea a été choisi en 2009 comme site de construction du TMT, le projet est paralysé par des oppositions culturelles. Pour les Hawaïens natifs, la "Montagne Blanche" est un lieu sacré. L’installation d’un télescope y est perçue comme un sacrilège. Manifestations, blocages de routes (notamment en 2015 et 2019), et recours devant la Cour suprême ont stoppé les travaux. Seule la première pierre a été posée.
En 2023, la création de la Mauna Kea Stewardship and Oversight Authority (incluant des Hawaïens natifs) a relancé le dialogue. Yuko Kakazu, responsable éducation du TMT, explique :
"Nous avons présenté des excuses pour les arrestations passées (comme celles des kupunas, les anciens respectés). Aujourd’hui, la majorité des opposants historiques soutiennent le projet, mais nous écoutons aussi ceux qui résistent.". Des initiatives locales (programmes éducatifs dans les écoles défavorisées) visent à montrer les bénéfices du TMT pour Hawaï.
Le retard des États-Unis dans la construction de télescopes géants s’explique aussi par une vision totalement différente de la science, tant au niveau politique que du financement.
Comme au Mauna Kea, ils rencontrent plus de difficultés a concilier projet scientifiques et enjeux locaux. Mais ils se heurtent aussi a un modèle de financement inadapté
"Nous avons présenté des excuses pour les arrestations passées (comme celles des kupunas, les anciens respectés). Aujourd’hui, la majorité des opposants historiques soutiennent le projet, mais nous écoutons aussi ceux qui résistent.". Des initiatives locales (programmes éducatifs dans les écoles défavorisées) visent à montrer les bénéfices du TMT pour Hawaï.
Dans la course aux géants, le retard américain : politique et financement
Le retard des États-Unis dans la construction de télescopes géants s’explique aussi par une vision totalement différente de la science, tant au niveau politique que du financement.
Comme au Mauna Kea, ils rencontrent plus de difficultés a concilier projet scientifiques et enjeux locaux. Mais ils se heurtent aussi a un modèle de financement inadapté
Leur tradition de financement privé (fondations, philanthropes) était certes très efficace pour les petits télescopes (mont Wilson, Palomar), mais totalement insuffisante pour des projets à hauteur de milliards de dollars.
Le resultat est effarant: le GMT est financé à seulement 25 % et le TMT à 70 % après deux décennies d’efforts... DEUX, C’EST TROP
Pourquoi alors avoir mis en concurrence deux télescopes? Les projets GMT et TMT ont longtemps rivalisé, divisant les ressources et au final un seulement pourrait être finalise, avec du retard, et ne rivalisera même pas de près avec l'ELT européen!
Voici les plus grands télescopes optiques au monde (taille des miroirs):
EN CONSTRUCTION
1/ Extremely Large Telescope (ELT): 39 m / construit a 50% environ et prévu pour 2028.
Son miroir primaire fera 39 mètres de diamètre. Il captera environ 15 fois plus de lumière que les plus grands télescopes actuels et devrait ouvrir la voie a d'importantes découvertes.
2/ Thirty Meter Telescope (TMT): 30 m / a peine démarré, pas de date d’achèvement.
3/ Giant Magellan Telescope (GMT): 24.5 m / complété a 40%. Planifie vers 2035
ACTUELS: il n'existe que 23 télescopes optiques dont le diamètre est supérieur a 4 m !
Gran Telescopio Canarias: 10.4 m / achevé en 2007. Il se situe sur l’île de La Palma, a 2267 mètres d’altitude, a l'observatoire Roque de los Muchachos. Son miroir principal est en fait compose de 36 petits miroirs de vitrocéramique hexagonales de 1,9 mètres de large. Chacun fait 8cm d’épaisseur et pèse 470 kg. Il possède un système d'optique active qui permet de corriger les déformations du miroir réflecteur.
Bien que le Gran Telescopio Canarias soit, individuellement, le plus grand, le plus puissant en attendant l'ELT est bien le VLT:
Very Large Telescope: construit par l'ESO (comme l'ELT) dans la région d'Antofagasta au Chili, il culmine a 2636 mètres d'altitude. Il est constitué de 4 plus petits télescopes chacun équipés d'un miroir primaire de 8,2 m. Ces 4 télescopes peuvent être utilises ensemble et équivalent alors a un télescope dont le miroir principal mesurerait 16,4 m de diamètre ! Il peut observer dans la lumière visible mais aussi infrarouge.
Very Large Telescope: construit par l'ESO (comme l'ELT) dans la région d'Antofagasta au Chili, il culmine a 2636 mètres d'altitude. Il est constitué de 4 plus petits télescopes chacun équipés d'un miroir primaire de 8,2 m. Ces 4 télescopes peuvent être utilises ensemble et équivalent alors a un télescope dont le miroir principal mesurerait 16,4 m de diamètre ! Il peut observer dans la lumière visible mais aussi infrarouge.
Mais il existe d'autres télescopes, notamment les télescopes solaires.
Le plus grand télescopes solaire d'Europe se prénomme Gregor (le 3e au monde) et se trouve sur l'ile de Tenerife dans le parc national du Teide a 2390m d'altitude. Son miroir mesure seulement 1.5m (pas besoin de faire rentrer beaucoup de lumière pour le soleil). La lumiere voyage a travers sa tour, sous vide, qui mesure 55,6 mètres de hauteur !
Gregor est aussi équipé d'un système qui compense les turbulences atmosphériques, ce qui offre des images d'une qualité jusque la inégalée.
Le plus grand télescope solaire se trouve a Maui, Hawaï. Le Daniel K. Inouye Solar Telescope (DKIST) trône a 3084 m d'altitude (autant que possible au-dessus des perturbations atmosphériques). Il est considéré comme le plus grand car son miroir fait 4 m de diamètre. Cependant, sa ''longueur focale'' n'est que de 22m.
Le second plus grand se situe en Chine: Chinese Large Solar Telescope (CLST).
Pour plus d'informations sur le soleil, je vous envoie vers mon article sur notre étoile.
Le système est lent mais efficace, et déjà éprouvé avec le VLT (Very Large Telescope) dans les années 1990: 4 télescopes de 8,2 m combinables en interféromètre (VLTI), offrant une résolution équivalente à un télescope de 130 m.
L'ELT positionnera l'Europe comme leader de l'astronomie optique.
Face à la stratégie libérale américaine, l'Europe a opté pour une approche collective via l'ESO (Observatoire européen austral). Le modele de financement est clair: mutualisation des fonds de 16 États membres. Cela a permis de réunir 1,5 milliard d'euros pour l'ELT.Le système est lent mais efficace, et déjà éprouvé avec le VLT (Very Large Telescope) dans les années 1990: 4 télescopes de 8,2 m combinables en interféromètre (VLTI), offrant une résolution équivalente à un télescope de 130 m.
Il aura permis des découvertes majeures, notamment la première image directe d'une exoplanète (Bêta Pictoris b), l’étude des étoiles orbitant le trou noir galactique, l'analyse d'atmosphères d'exoplanètes habitables (GJ 1214 b).
A l'oppose, les Etats-Unis ont subi un echec cuisant avec les télescopes Keck (10 m, Hawaï) qui n'ont pas pu développer d'interférométrie faute de financements.
L'ELT continue donc sa marche en avant et le géant avance:
- construction à plus de 50 %
- 6 instruments scientifiques déjà en développement.
Objectif : Une première lumière en 2028.
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